
L’esprit Art nouveau
Cécilie Champy-Vinas, conservatrice du patrimoine, directrice du musée Zadkine
Joëlle Raineau-Léhuédé, collaboratrice scientifique arts graphiques, Petit Palais
Clara Roca, conservatrice du patrimoine, chargée des collections d’arts graphiques et de photographies des XIXe et XXe siècles, Petit Palais
Avec la collaboration de Bérengère Massignon, docteure de l'École Pratique des Hautes études (EPHE-PSL), section des sciences religieuses
Cette exposition a pour objet de faire connaître le fonds d’atelier de cet artiste touche-à-tout généreusement donné au Petit Palais en 2015 par la famille Massignon. Nous tenons à remercier tout particulièrement l’arrière-petite-fille de Pierre Roche, Bérengère Massignon, dans l’élaboration de ce projet.




- Le parcours d’un artiste touche-à-tout
- Voyages
- Faune et flore
- Loïe Fuller
- Affiches à la feuille d’or
- Le processus créatif
- Affinités électives
- Dialogue par l’art – Pierre Roche et son fils, Louis Massignon
- La mort et la guerre
- Le fonds d’archives du Petit Palais
- Programmation autour de l'exposition
- Remerciements

Le parcours d’un artiste touche-à-tout
Le fonds Pierre Roche du Petit Palais reflète la curiosité d’un artiste influencé autant par l’Art nouveau que par le symbolisme et le japonisme. Ce fonds d’atelier, composé de dessins, de gravures, mais aussi de notes, de croquis et d’archives, est riche de plus de 4 000 pièces. Miraculeusement préservé, il est resté dans la famille de l’artiste pendant près d’un siècle avant d’être donné au Petit Palais, grâce à la générosité de Nicole Massignon, la petite-fille par alliance de l’artiste et de Bérengère Massignon, son arrière-petite-fille. Cette exposition virtuelle est l’occasion de découvrir, à travers une sélection d’œuvres, le travail original et raffiné d’un artiste qui a largement contribué au renouveau esthétique des années 1900.
Pierre Roche, de son véritable nom Ferdinand Massignon (1855-1922), participe pleinement à l’effervescence artistique au tournant des XIXe et XXe siècles. Touche-à-tout, inventif et curieux, il se forme à la peinture auprès d’Alfred Roll, à la sculpture avec Jules Dalou, et se passionne pour les arts décoratifs et la gravure. Son œuvre aborde tous les domaines de la création, des sculptures pour la façade du théâtre-musée de la Loïe Fuller construit pour l’Exposition universelle de 1900, aux délicates affiches sur feuille d’or créées pour le Salon des Cent. Certaines de ses sculptures ornent toujours les parcs et les rues de Paris, comme l’Effort au jardin du Luxembourg ou la fontaine Avril installée devant le Palais Galliera.

Anonyme
Photographie
Collection particulière

Anonyme
Photographie
Collection particulière
Chronologie
1855 |
Naissance de Pierre-Henri Ferdinand Massignon dit Pierre Roche. Fils de Louise Geneviève Célina Roche et de Ferdinand Charles Massignon, pharmacien. |
1873 |
S’inscrit à l’Académie Julian — cours de peinture et de gravure — en même temps qu’il suit ses cours de médecine. Fréquente Roll qui devient son maître. |
1880 |
Roche est pharmacien depuis 1879. Mariage avec Marie Ferdinande Catherine Hovyn. |
1883 |
Naissance de son fils, Louis, à leur domicile de Nogent-sur-Marne. |
1884 |
Expose Ruth lors de sa première participation au Salon de la Société des artistes français. Choisit de prendre le nom de sa mère comme nom d’artiste. Il devient "Pierre Roche". |
1887 |
Fréquente l’atelier du sculpteur Émile-Louis Truffot. |
1888 |
La revue Le Japon artistique de Siegfried Bing diffuse des estampes originales de Pierre Roche. |
Naissance de sa fille, Henriette-Thérèse-Marie. | |
Réalise la maquette de Danton qui attire l’attention d’Aimé-Jules Dalou pour un concours organisé par le Conseil municipal de Paris. | |
1889 |
Reprend ses cours à l’Académie Julian dans la section sculpture. |
Travaille dans les ateliers d’Henri Gervex, Alfred Roll et Jacques Ferdinand Humbert à l’école d’art La Palette. |
|
Présente Monument à Lazare Carnot au salon de la Société des artistes indépendants dans la section sculpture. Il quitte la Société des Artistes Français l’année suivante. |
|
1891 |
Dalou crée une section arts décoratifs à la Société nationale des Beaux-Arts. Roche y est reçu associé, puis sociétaire en 1893. |

Pierre Roche
Bas-relief en marbre blanc et cadre en pierre
1897
Maison de Pierre Roche à la Ville Évêque à Pordic

Pierre Roche
Bas-relief en marbre blanc et cadre en pierre
1897
Maison de Pierre Roche à la Ville Évêque à Pordic
1892 | Expose à la Société nationale des Beaux-arts au Champs de Mars une dizaine d’aquarelles estampées dans la section Dessins, aquarelles, pastels, miniatures. Présente également une sculpture, Biblis, projet de fontaine pour un jardin d’hiver. |
1893 | Publication d’Algues marines, gypsographie bicolore de Pierre Roche dans L’Estampe originale. |
1894 | Expose pour la première fois au Salon des Cent. |
Membre du jury de la section sculpture de la Société nationale des Beaux-Arts, présidé par Rodin. | |
1895 | Des œuvres de Pierre Roche sont exposées lors de l’ouverture du magasin L’Art Nouveau de Siegfried Bing. |
Pierre Roche fait paraître la définition de la "gypsographie" dans la Revue Encyclopédique. Il écrira à plusieurs reprises sur son art. | |
Rencontre avec Alexandre Bigot, céramiste, qui devient son principal collaborateur. | |
1896 | Mise au point des gypsotypies, un nouveau procédé de gravure. Invente les statues de neige pour la visite du Tsar Nicolas II à Paris. Participe une première fois au Salon de La Libre Esthétique à Bruxelles. |

Anonyme
Photographie
Vers 1898
Collection particulière

Anonyme
Photographie
Vers 1898
Collection particulière
1897 | Expose Andromède, estampe églomisée et des reliures églomisées au Salon national des Beaux-Arts dans la section Dessins, Sculptures et Objets d’art. |
1898 | Crée le frontispice de La Cathédrale de Joris-Karl Huysmans, en parchemin églomisé. |
1899 | Son ami Roger Marx fonde la Société des Amis de la médaille française dont Pierre Roche fera partie. |

Henri Garnier
1902
Photographie
Collection particulière

Henri Garnier
1902
Photographie
Collection particulière
1900 | Consécration par le critique Clément Janin qui fait paraître "Un artiste inventeur. Pierre Roche" dans la Revue des arts décoratifs. |
Expose 50 gypsographies chez le marchand et éditeur Sagot, 39 bis rue de Châteaudun. | |
Expose L’Effort à l’Exposition universelle de Paris : reçoit une médaille d’argent et obtient la commande de l’Etat. Membre du jury "Décoration et mobiliers des édifices publics et habitations" à l’Exposition universelle. | |
Construction du musée-théâtre de Loïe Fuller par l’architecte Henri Sauvage, et les décorateurs Francis Jourdain et Pierre Roche. |

Anonyme
Vers 1901
Photographie
Collection particulière

Anonyme
Vers 1901
Photographie
Collection particulière
1902 | Participe à une exposition au Palais Galliera consacrée à la reliure moderne. |
Crée le masque mortuaire de Dalou. | |
Construction de sa maison de la Ville Évêque à Pordic en Bretagne. | |
1903 | Membre fondateur de l’Académie des arts de la fleur et de la plante. Il y enseigne le modelage. |
Décoration de l’église Saint-Jean de Montmartre. | |
Fonde la Société internationale d’art populaire et d’hygiène avec Jean Lahor. | |
1904 | Illustre Loïe Fuller de Roger Marx pour la Société des Cent Bibliophiles. |
Exposition L’Art rustique (du 15 janvier au 1er février) au Petit Palais dans deux salles du rez-de-chaussée en parallèle du Salon des Artistes décorateurs. | |
1905 | Expose 10 gypsographies à la 2e exposition de la Société de la gravure originale en couleurs à la Galerie George Petit. Il y expose chaque année jusqu’en 1912. |
1906 | Président du premier bureau de la section Objet d’art à la Société des Arts décoratifs pour laquelle il organise une exposition d’art rustique. |

Henri Garnier
Photomontage
Vers 1904
Collection particulière

Henri Garnier
Photomontage
Vers 1904
Collection particulière
1908-1915 | Création d’invitations en gypsographie pour les Dîners des Amis de l’art japonais. |
1910 | Nommé Chevalier de la Légion d’honneur. |
1911 | Crée avec José Maria de Heredia le livre, Poèmes. |
Participe à l’exposition "L’art chrétien moderne" au Pavillon de Marsan et à l’"Exposition de grès, faïences, terres Dîners des Amis de l’art japonais cuites et leurs applications" au musée Galliera. | |
1913 | Est l’un des créateurs de la Société des Amateurs de jardins. Organise l’exposition L’art du jardin à Bagatelle. |
1914 | Entreprend sa série Une histoire métallique de la guerre en 80 médailles. |
Participe à l’exposition "La Statuette et le Meuble" à Galliera. | |
1921 | Réalisation du monument aux morts de la ville de Binic en Bretagne et de Monument à la gloire des instituteurs et élèves-maîtres du Nord morts pour la France à Douai. |
1922 | Décès dans son atelier, à Paris. Il est inhumé dans la chapelle familiale du cimetière de Pordic. |
1923 | Organisation d’une exposition rétrospective au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts. Léandre Vaillat publie Le Tombeau de Pierre Roche consacré à son œuvre. |
Rare peinture de Pierre Roche conservée, Diane endormie témoigne des débuts d’un artiste influencé par le langage académique. Le thème choisi rappelle les Vénus allongées de Titien et de Giorgione. Ces deux modèles sont repris au XIXe siècle par Cabanel, le maître des peintres Gervex et Humbert, eux-mêmes professeurs de Pierre Roche. On observe déjà un basculement par rapport à l’académisme : des ossements jonchent le sol et les silhouettes noires des chiens de la déesse apportent une atmosphère inquiétante.
Pierre Roche (1855-1922)
Huile sur toile
H.60 x L. 120,2 cm
Bordeaux, musée des Beaux-arts de Bordeaux,
inv. Bx E 1762
Pierre Roche (1855-1922)
Huile sur toile
H.60 x L. 120,2 cm
Bordeaux, musée des Beaux-arts de Bordeaux,
inv. Bx E 1762
"Je commence une fontaine. Hercule détournant l’Alphée pour nettoyer les écuries d’Augias. C’est une grosse besogne. Mais j’ai courage."
Journal de Pierre Roche, 7 novembre 1894.
Inspiré des travaux d’Hercule, le modèle de la statue est présenté en 1896 au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts. Il y obtient une médaille d’argent. L’État passe commande alors d’une version définitive qui sera achevée en 1900. Placée dans le jardin du Luxembourg en 1903, elle devait faire écho aux fontaines de Versailles étudiées par Pierre Roche. Elle ne sera jamais installée sur une pièce d’eau conformément aux souhaits de l’artiste. Par chance, elle échappe aux fontes de la Seconde Guerre mondiale.

Pierre Roche (1855-1922)
1900
Plomb et grès
H. 1.75 x L. 2.8 x P. 1.15 m (statue) ; H. 2.5 x L. 3.5 x P. 1.9 m (fontaine)
Paris, Jardin du Luxembourg, ville de Paris, inv. RF 1310

Pierre Roche (1855-1922)
1900
Plomb et grès
H. 1.75 x L. 2.8 x P. 1.15 m (statue) ; H. 2.5 x L. 3.5 x P. 1.9 m (fontaine)
Paris, Jardin du Luxembourg, ville de Paris, inv. RF 1310
Le critique d’art nancéen Jules Rais commande cette chapelle funéraire à Pierre Roche après la disparition subite de sa femme en 1899 pour le cimetière de Préville. L’iconographie religieuse et funéraire traditionnelle disparaît au profit du motif végétal du lys, symbolisant une nature en perpétuel renouveau. Monument unique à Nancy, le tombeau de Pierre Roche rejoint les recherches esthétiques des artistes Art nouveau de la ville, comme Émile Gallé, Louis Majorelle, Victor Prouvé et tant d’autres.

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Pierre, bronze et vitrail
Nancy, musée de l'École de Nancy, jardin

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Pierre, bronze et vitrail
Nancy, musée de l'École de Nancy, jardin
Fasciné par la diversité de l’art traditionnel des provinces françaises, Pierre Roche décide en 1901 de s’installer en Bretagne. Il fait construire une maison en pierre de la région, le granit, mais l’orne de ses créations à la fois décoratives et fonctionnelles pour la transformer en une œuvre d’art total. Son sceau personnel accueille le visiteur au-dessus de la porte d’entrée et le toit est décoré de mitrons, d’une girouette inspirée par Loïe Fuller et d’une sirène-cloche.

1902-1904
Granit, plomb, étain, grès émaillé

1902-1904
Granit, plomb, étain, grès émaillé
Pierre Roche imagine un projet de fontaine qu’il expose au salon de la Société nationale des Beaux-Arts en 1912. Le motif de la sirène, récurrent dans ses créations, se prête parfaitement à la fonction de l’œuvre. Un hippocampe envoie un puissant jet d’eau contre une conque tenue par la sirène, démultipliant les effets de jaillissement de l’eau. Une version en bronze est installée à Marseille en 1920. Elle a été attribuée à tort à Berthe Girardet.

Pierre Roche (1855-1922)
1912-1920
Bronze
Marseille, Parc Chanot

Pierre Roche (1855-1922)
1912-1920
Bronze
Marseille, Parc Chanot

Pierre Roche (1855-1922)
1912-1920
Bronze
Marseille, Parc Chanot

Pierre Roche (1855-1922)
1912-1920
Bronze
Marseille, Parc Chanot

Pierre Roche (1855-1922)
1903
Paris 18e arrondissement
photographie

Pierre Roche (1855-1922)
1903
Paris 18e arrondissement
photographie
Dans le dernier tiers du XIXe siècle, les façades des immeubles à Paris s’affranchissent de la rigueur haussmannienne. Le percement de la rue Réaumur en 1897 crée une émulation entre architectes et sculpteurs. Au numéro 39 de la rue, Pierre Roche imagine deux cariatides inspirées de son amie Loïe Fuller, le visage souriant, et supportant un balcon. Le naturel, le réalisme de la pose et des visages s’éloignent des canons académiques et montrent l’originalité de l’artiste même dans un cadre architectural monumental. Les Cariatides seront exposées à Société nationale des Beaux-Arts.

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Pierre de taille
Paris, 39 rue Réaumur (2e arrondissement)

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Pierre de taille
Paris, 39 rue Réaumur (2e arrondissement)
La statue, commandée par la ville de Paris en 1905, est installée un an plus tard dans le square du Palais Galliera. Cette allégorie du mois d’avril, symbolisé par le corps juvénile d’une jeune fille, évoque le renouveau du printemps après le répit de l’hiver. Pierre Roche joue sur la multiplicité des matériaux pour illustrer la fonte de la neige qui laisse éclore des fleurs d’or. L’emploi des formes courbes Art nouveau inspirées de la nature convient parfaitement à l’univers des jardins qu’affectionne Pierre Roche.

Pierre Roche (1855-1922)
1906
Pierre de Bourgogne, bronze, or, pâte de verre blanche, H. 4.35 m (piédestal et statue)
Paris, square du Palais Galliera, ville de Paris, inv.COA-1669ROC

Pierre Roche (1855-1922)
1906
Pierre de Bourgogne, bronze, or, pâte de verre blanche, H. 4.35 m (piédestal et statue)
Paris, square du Palais Galliera, ville de Paris, inv.COA-1669ROC
Retrouvez les œuvres de Pierre Roche toujours dans l’espace public sur cette carte interactive
Chaque épingle correspond à une œuvre de Pierre Roche dans l’espace public. N'hésitez pas à cliquer sur les points pour obtenir plus d'informations et voir les images. Pensez à utiliser le – ou +, en haut à gauche, pour réduire ou agrandir la carte. Pour mettre la carte en plein écran, cliquer sur le pictogramme "plein écran". Il y a des œuvres de Pierre Roche à Binic, Pordic, Douai, Nancy, Paris, Tulle ou Marseille.

Voyages
De ses premiers voyages en Italie en 1880 et 1881, alors qu’il n’a pas encore abandonné son premier métier de pharmacien pour se consacrer à une carrière d’artiste, Pierre Roche rapporte de nombreux croquis de paysages. Il n’aura de cesse de voyager : en Suisse, en Angleterre, à travers la France, mais aussi en Orient (Algérie, Égypte, Maroc). Roche décrit, dessine et peint à l’aquarelle ce qu’il voit dans des carnets ou sur des feuilles libres. Il se constitue ainsi un ensemble de motifs et forme aussi bien son œil que sa main.
Parallèlement, Roche nourrit son imaginaire de lieux surnaturels, de personnages légendaires ou mythiques, et assimile des références extra-occidentales. Comme il le note dans son journal le 3 octobre 1888, ses propres lectures alimentent son univers "Je viens de lire des légendes bien curieuses de Chine ; c’est un peu le ton des milles et nuits mais souvent avec plus de délicatesse."
Voyages "réels"
Ces cinq aquarelles peintes lors d’un voyage effectué en 1886 appartiennent à une série consacrée à l’Algérie et plus particulièrement à la Kabylie. Pierre Roche, qui débute alors sa carrière d’artiste, détaille les coutumes et traditions, les costumes et les conditions de vie de ce peuple des montagnes.
Voyages oniriques
Proche de plusieurs représentants du symbolisme, mouvement avec lequel il a de nombreuses affinités, Pierre Roche recherche l’insolite et le fantastique. Par ses choix d’encrage aux tonalités froides, il crée volontiers dans ses estampes des ambiances énigmatiques et mélancoliques. Dans Le Château des songes, un être réduit à une simple silhouette suit un chemin sinueux menant à un palais à travers ce qui semble être un astre lumineux et mystérieux. L’encrage irrégulier accentue l’aspect nébuleux de l’estampe.

Faune et flore
Pharmacien avant d’être artiste, Pierre Roche étudie la nature avec acuité et y puise volontiers son inspiration. Il se compose des répertoires de formes qui abondent son univers créatif, comme ce grand alguier (herbier d’algues). Les végétaux et animaux – plantes et algues, insectes, batraciens, oiseaux, mammifères… – peuplent ainsi son œuvre et s’hybrident selon sa volonté, créant des formes nouvelles qui nourrissent tous les aspects de sa production artistique. L’artiste laisse libre cours à sa fantaisie décorative.
Dans les œuvres de Pierre Roche représentant des animaux et végétaux, l’influence de l’Art nouveau et celle de l’art japonais sont particulièrement prégnantes. Cette dernière se manifeste dans les formes et les couleurs choisies par l’artiste, ainsi que dans ses choix de techniques qu’il élabore et perfectionne à l’aune des maîtres de l’estampe japonaise. Le 1er mai 1890, il note ainsi dans son journal "L’Exposition des gravures japonaises est ouverte et elle est des plus intéressantes. Les procédés comme les colorations y sont d’un art tout à fait particulier. Le papier dont la partie est satinée et gaufrée à certains endroits prend une part extrême à la signification de la gravure. Les nuances très délicates dans un premier temps 1600 et quelques deviennent plus violentes et plus ocrés vers notre époque et 1800 environs où règne en maître Hokusai. Ce beau talent est d’une souplesse merveilleuse, il possède la gamme entière de toutes ces œuvres charmantes et est d’une variété de procédés, de coloration et de composition dont on peut donner difficilement l’idée."
Aquarelles estampées
En 1892, l'artiste commence ses expérimentations sur papier avec ces délicats gaufrages rehaussés à l'aquarelle, inspirés des surimono japonais. Pierre Roche a pu en voir à Paris chez le collectionneur et marchand d’art japonais Siegfried Bing qui lui offre son soutien pour publier ses estampes. Chaque épreuve présente un gaufrage très léger, parfois à peine perceptible. Elle est ensuite peinte à la main par l’artiste, et donc toujours unique.
Insectes
Les insectes sont omniprésents dans l’œuvre de Pierre Roche et offrent un inépuisable vivier de motifs décoratifs. L’artiste pose aussi sur les papillons, scarabées, libellules et mouches un regard presque scientifique. Il recherche dans ses aquarelles estampées un effet très réaliste, révélant ses capacités de fin observateur et dessinateur. Les espèces qu’il étudie sont ainsi précisément reconnaissables.
L’Estampe originale
La revue L’Estampe originale (1893-1895) défend l’estampe comme œuvre d’art à part entière. Le directeur André Marty y édite des artistes comme Paul Gauguin ou Édouard Vuillard. Ceux-ci conçoivent des œuvres originales, imprimées en un petit nombre d’exemplaires souvent numérotés et signés pour en renforcer le caractère authentique et précieux. Pierre Roche est sollicité à deux reprises afin de promouvoir ainsi son travail. Il imprime Algues marines gypsographie bicolore, tirée à 100 épreuves, publiée lors de la quatrième livraison, (octobre-décembre 1893, n°35) et La Salamandre, lithographie sculptée éditée pour l’album qui clôture la série (9ème livraison, mars 1895, n°91).
Alguier
Constitué à l’âge de 19 ans, alors que Roche est apprenti pharmacien, cet alguier témoigne de l’intérêt précoce du futur artiste pour les formes de la nature. Les alguiers (herbier d’algues) de son fonds d’atelier sont des compilations de formes et de couleurs qui lui servent d’inspiration pour de nombreux dessins et estampes. Le spécimen de l’espèce dictyopteris polypodioides de cet alguier semble ainsi être fidèlement reporté dans sa planche Algues marines pour L’Estampe originale.

Pierre Roche
Plume sur papier blanc imbriqué dans une feuille de papier brun
Paris, Petit Palais, inv. PPL229
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche
Plume sur papier blanc imbriqué dans une feuille de papier brun
Paris, Petit Palais, inv. PPL229
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015
Plantes
Pierre Roche est membre fondateur de l’Académie des Arts de la fleur et de la plante. L’institution, créée en 1903, réunit des artistes pour lesquels la flore est source d’inspiration. Installée dans un bâtiment de l’établissement horticole de la Ville de Paris qui gère les squares et jardins de la capitale (l’actuel jardin des serres d’Auteuil), l’Académie dispense des cours gratuits à des artistes confirmés : Pierre Roche assure ceux de modelage.

Pierre Roche (1855-1922)
1911-1912
Terre cuite
Photographies
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1911-1912
Terre cuite
Photographies
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1911-1912
Terre cuite
Photographies
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1911-1912
Terre cuite
Photographies
Collection particulière
Animaux
Pierre Roche observe ses modèles dans la nature et les dessine sous tous les angles afin de les reporter ensuite sur ses gypsographies ou ses plaquettes et médailles. L’artiste a une prédilection pour les insectes, les oiseaux et la faune aquatique, mais ne s’y limite pas. La plaquette Tête de Tigre est quant à elle créée à partir d’une photographie de chat mort conservée dans sa documentation. L’historien de l’art Paul Vitry la présente comme "une curieuse plaquette où une tête de chat écorchée prend des allures de grand fauve". À l’origine, elle devait orner une porte.

Pierre Roche (1855-1922)
Grès émaillé
10 x 10 x 0,8 cm
Paris, Petit Palais, inv. PPS3851
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche (1855-1922)
Grès émaillé
10 x 10 x 0,8 cm
Paris, Petit Palais, inv. PPS3851
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche (1855-1922)
Photographie
Fonds documentaire Pierre Roche, Petit Palais
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche (1855-1922)
Photographie
Fonds documentaire Pierre Roche, Petit Palais
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche (1855-1922)
Vers 1897,
Grès émaillé d’Alexandre Bigot,
Diam. cm : 24,5
Musée des Arts décoratifs,
inv. 8565.

Pierre Roche (1855-1922)
Vers 1897,
Grès émaillé d’Alexandre Bigot,
Diam. cm : 24,5
Musée des Arts décoratifs,
inv. 8565.

Pierre Roche – Alexandre Bigot
1900
Grès émaillé d’Alexandre Bigot
H. : 3,9 : L. 8 ; P. 7 cm
Musée des Arts décoratifs
Inv. : 27962

Pierre Roche – Alexandre Bigot
1900
Grès émaillé d’Alexandre Bigot
H. : 3,9 : L. 8 ; P. 7 cm
Musée des Arts décoratifs
Inv. : 27962
La Fée Morgane
Roche est fasciné par les mythes et traditions anciennes. Le motif de la sirène est un de ses thèmes favoris. La Fée Morgane s’inspire d’un personnage légendaire. Fée ou esprit des eaux, son pouvoir est bénéfique comme redoutable. Pour cette représentation, Roche transforme les bras et les pieds de la fée en nageoires, et ses cheveux en algues. Les courbes et ondoiements de ses membres sont caractéristiques de l’esthétique Art nouveau.

Pierre Roche (1855-1922)
1904
Satuette en bronze et plomb, médaillon en bronze, socle en marbre noir
H. 83 x L. 24,5 x P. 16 cm (dont base)
Paris, Musée d’Orsay, inv.RF 3281

Pierre Roche (1855-1922)
1904
Satuette en bronze et plomb, médaillon en bronze, socle en marbre noir
H. 83 x L. 24,5 x P. 16 cm (dont base)
Paris, Musée d’Orsay, inv.RF 3281
Cherchant à créer des objets esthétiques et utiles à la vie quotidienne, Pierre Roche a inventé ces masques de route afin de protéger le visage des automobilistes d’éventuels accidents. Il est lui-même très tôt conducteur de voiture. Avec ce curieux masque, il anticipe aussi l’hybridation de l’homme et de la machine.

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Argent ou aluminium repoussé
Photographie
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Argent ou aluminium repoussé
Photographie
Collection particulière
Arts décoratifs
Si Pierre Roche destine souvent ses œuvres à une élite ou à son cercle d’amis, il a également pour ambition de proposer un art social, accessible à un plus large public. Dans une démarche propre à l’Art nouveau, il cherche aussi à abolir la hiérarchie entre les arts majeurs et les arts mineurs. Il crée par exemple Sa théière en forme de têtard en est un bon exemple. Il la fabrique en étain pour un usage quotidien, mais la décline aussi en argent, dans une version plus luxueuse, pour l’exposer au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts. Il produit également des assiettes émaillées avec le céramiste Alexandre Bigot.
Cette luciole aurait été créée pour éclairer la galerie L’Art Nouveau de Siegfried Bing. L’ampoule se place sous le ventre de l’animal.

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Bronze
H. 20,5 x L. 22 x P. 16 cm
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Bronze
H. 20,5 x L. 22 x P. 16 cm
Collection particulière
Montage
Pierre Roche porte une attention particulière à la présentation des œuvres. Il peut être simple participant lors de salons ou de manifestations, mais aussi commissaire d’exposition. Les photographies d’expositions conservées dans son fonds d’atelier témoignent de ses recherches en la matière. Le montage très raffiné de cette estampe en est un autre exemple. Le papier choisi, gaufré, et jouant du contraste entre le noir et l’or, montre la grande influence de l'art japonais sur l'artiste.

Pierre Roche
1896
Gypsographie montée sur papier japonais
24 x 20 cm (53 x 35 cm montage)
Institut National d'Histoire de l'Art,
inv. EM ROCHE 17

Pierre Roche
1896
Gypsographie montée sur papier japonais
24 x 20 cm (53 x 35 cm montage)
Institut National d'Histoire de l'Art,
inv. EM ROCHE 17

1901
Photographie
Collection particulière

1901
Photographie
Collection particulière

Loïe Fuller
Figure mythique du Paris fin de siècle, Loïe Fuller révolutionne le spectacle vivant en faisant tournoyer ses voilages, tel un papillon, éclairé par des projections lumineuses multicolores. Elle inspire nombre d’artistes de son temps, de Toulouse-Lautrec à Rodin. Ami de la danseuse, Pierre Roche la dessine, croquant le mouvement de sa silhouette, et la sculpte, restituant de manière virtuose le déploiement de ses voiles dans l’espace. Il laisse de nombreux portraits de son égérie et lui a même consacré un livre illustré avec le critique d’art Roger Marx. Le 24 février 1893, Pierre Roche indique dans son journal "Déjeuné ce matin chez Roger Marx avec la Loïe Fuller, petite tête singulière et volontaire de vieille miss anglaise. Les gestes un peu communs mais tout à fait vifs ; les yeux petits et brillants, parlant avec volubilité et gaité. Fort éprise de tout ce qui touche aux arts, spontanée autant qu’on peut l’être, sans faire modestie et tout à fait à l’aise. Rien de la danseuse de l’Opéra dans son allure, de la gaminerie bien naturelle. Les aquarelles lui plaisent beaucoup, elle promet de revenir autant qu’on voudra."
Loïe Fuller
L’Américaine Loïe Fuller est une véritable icône du Paris 1900. Elle a participé à un profond renouvellement des arts du spectacle, avec ses procédés d’éclairages électriques et phosphorescents. Loin de la danse académique, ses chorégraphies sont innovantes et s’appellent "danse serpentine", "danse du feu" ou encore "danse du lys". Arrivée en Europe en 1892, elle s’attache à la capitale française où elle poursuit ses recherches, connaît un immense succès et noue des liens avec de nombreux artistes et scientifiques.
La Loïe Fuller
Danse fleur de lotus
France 1897 Production : GAUMONT
©Collection Lobster Films
L’édition de Loïe Fuller
Pierre Roche crée un ensemble de gypsotypies pour illustrer un texte de Roger Marx sur Loïe Fuller. De ce projet, le Petit Palais possède l’exemplaire dédicacé par Loïe Fuller "à mon très grand ami Pierre Roche", ainsi que l’exemplaire de travail de l’artiste avec ses essais de mises en page et de mises en couleur (1904). Il résume à lui seul les 10 ans de recherches nécessaires pour constituer cette édition d’art. Publiée à 130 exemplaires par la Société des Cent Bibliophiles, elle contient dix-huit gypsotypies sur papier japonais. Pierre Roche se passionne pour le mouvement et, à l’instar d’Etienne-Jules Marey et Eadweard Muybridge, analyse et décompose les positions de la danseuse dans l’espace. Les dessins aux tonalités chaudes et douces ont été réalisés lors des spectacles de la danseuse et révèlent la grâce de ses mouvements, et la belle expressivité de ses voiles. Le motif décoratif de la girouette poursuit cette recherche sur le tourbillonnement de sa robe pénétrée par le vent. Enfin, Pierre Roche n’omet pas de représenter Loïe Fuller au repos, offrant d’elle un rare portrait intimiste.
Statuette de Loïe Fuller
Cette statuette représentant Loïe Fuller l’est une des œuvres les plus connues de Pierre Roche. Elle frappe par l’expressivité plastique puissante du grand voile déployé par la danseuse, qui prend des allures de flamme. L’effet décoratif du drapé ondulé et tournoyant est loué par les critiques qui admirent cette sculpture à l’occasion de plusieurs salons, et surtout à l’Exposition universelle de 1900.
![Statuette [Loïe Fuller]](/sites/default/files/styles/oeuvre_expo_virtuelle_mobile/public/2022-02/PR27_jpg.jpg?itok=TkJ99gw4)
Pierre Roche
1889-1909
Bronze noir à patine rousse; socle en marbre noir
H. 50,5 x L. 28,5 – P. 30 cm
Musée des Arts décorartifs, inv. 27955
![Statuette [Loïe Fuller]](/sites/default/files/styles/oeuvre_expo_virtuelle_modal/public/2022-02/PR27_jpg.jpg?itok=Xq4bhoGX)
Pierre Roche
1889-1909
Bronze noir à patine rousse; socle en marbre noir
H. 50,5 x L. 28,5 – P. 30 cm
Musée des Arts décorartifs, inv. 27955
La Loïe Fuller
La Danse du feu
France 1899 Production : STAR FILM
Réalisation : Georges MELIES
©Collection Lobster Films
Pierre Roche installe en haut de sa maison située rue de la Ville Évêque à Pordic une girouette à l’effigie de Loïe Fuller. Elle sera exposée au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts de 1902, et sera décrite ainsi par Paul Vitry "C’est une gracieuse figurine de femme enveloppée de longs voiles collants qui flottent derrière elle et laissent transparaître le modelé délicat de son jeune corps. La pointe de son pied seule touche le pivot ; tout son corps se porte en avant et son bras tendu indique la direction du vent."

Pierre Roche (1855-1922)
1896-1897
Crayon graphite
Petit Palais
PPD5804

Pierre Roche (1855-1922)
1896-1897
Crayon graphite
Petit Palais
PPD5804

Henri Garnier
1896-1897
Photographie
Collection particulière

Henri Garnier
1896-1897
Photographie
Collection particulière
Pierre Roche écrit à son sujet dans son journal le 4 janvier 1894
"Impression de force nerveuse extraordinaire dans ce corps de femme dans ses gestes sa voix son regard mais surtout lorsqu’elle commence à esquisser des pas de danse avec des ondulations souples et nerveuses des détentes de ressort d’acier. Et puis son talent de comédienne de femme très fine très rusée modifiant son ton et ses allures pour chacun. Non pas bon garçon mais très femme à l’occasion. Lerolle en sait quelque chose."

Harry C. Ellis
Entre 1900 et 1922
Aristotype gélatine sur papier baryté
24,2 x 19,5 cm
Paris, Petit Palais, inv. PPPH00776
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Harry C. Ellis
Entre 1900 et 1922
Aristotype gélatine sur papier baryté
24,2 x 19,5 cm
Paris, Petit Palais, inv. PPPH00776
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Affiches à la feuille d’or
La revue littéraire La Plume commande des affiches pour annoncer le Salon des Cent, manifestation qu’elle accueille de 1894 à 1900, dans le hall de son siège, au 31, rue Bonaparte, à Paris. La revue comme le salon participent à un mouvement de revalorisation et de reconnaissance de l’art de l’estampe. Ce salon est surtout réservé à des collectionneurs ou des amateurs d’œuvres uniques ou à petits tirages. Les estampes comme les affiches, éditées à un petit nombre d’exemplaires, créées par des artistes défendus par la revue, deviennent rapidement des objets de collection à part entière.
Restauration des affiches à la feuille d’or
Pierre Roche crée deux spectaculaires affiches pour lesquelles il emploie de la feuille d’or. Il pousse ainsi à son extrême l’idée que l’affiche est une forme d’art à part entière et peut être précieuse, collectionnée pour elle-même. Ces affiches sont représentatives de son travail sur les matériaux rares et les processus techniques complexes.
Deux grandes affiches à la feuille d’or ont été restaurées pour être présentées dans l’exposition. Alexandre Pandazopoulos, conservateur-restaurateur du patrimoine spécialisé dans les œuvres d’art sur papier, a conduit cette opération. Les tâtonnements techniques de l’artiste expliquaient en partie leur état : elles présentaient de nombreux plis, déchirures, lacunes et soulèvements. Son travail a permis de présenter les affiches lors de l’animation des collections "L’esprit Art Nouveau. La donation Pierre Roche au Petit Palais" (10 mars – 11 septembre 2022) : les déchirures ont été consolidées avec du papier teinté à l’aquarelle, et les lacunes fragilisant le papier ont été comblées. En revanche, l’intervention n’incluait pas de mise à plat générale de l’affiche étant donné sa fragilité générale et le caractère expérimental des techniques mises en œuvre. Il n’était en effet pas souhaitable de minimiser les dégradations propres aux expérimentations et au processus créatif de l’artiste, telle la trame de plis. Enfin, les affiches ont été montées sur un carton qui permet de les manipuler et de les ranger de manière plus sûre, ou encore de les présenter encadrées.

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Feuille d'or églomisée
H. 55 x L. 45 cm
Petit Palais, inv. PPG5873
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Feuille d'or églomisée
H. 55 x L. 45 cm
Petit Palais, inv. PPG5873
Don Nicole et Bérengère Massignon, 2015


"La vitrine est partie sans encombre et placée à La Plume. Il y aura aussi à cette exposition des gypsographies, un entrefilet dans le numéro du mois et un article sur les statues de neige signé"
Journal de Pierre Roche, 3 décembre 1894
Affiches à la feuille d’or
En 1896, Roche publie dans La Plume un article intitulé "Verres églomisés. Le mot et la chose". Il y retrace l’histoire de cette technique qui consiste à fixer une couche de verre, sous laquelle un dessin a été peint, sur une feuille d’or ou d’argent. Il la transpose dans le domaine des arts graphiques l’année suivante en créant deux affiches pour le Salon des Cent. Pierre Roche propose une allégorie féminine du journal – plume de paon ou bien plume d’écriture. Il joue sur la superposition des encres sur la feuille d’or pour créer ce qu’il appelle une églomisation.

Le processus créatif
À la fin du XIXe siècle, Pierre Roche participe au renouvellement de l’art de l’estampe. Il s’inspire notamment des surimono d’Hokusai, luxueuses estampes, et de l’églomisation sur verre, technique employée dès l’Antiquité et développée au XVIIIe siècle, qu’il applique au papier, au parchemin ou au mica. Ses "écritures sur plâtre", ses estampes "de sculpteur" ou "de médailleur", comme les désignait le critique Roger Marx, contribuent à revivifier le domaine de l’image imprimée. De ses innovantes aquarelles estampées colorées à la main, épreuves absolument uniques, à ses gypsographies sur plâtre au modelé d’une grande douceur et au tirage limité, ces objets précieux en trois dimensions témoignent de sa maîtrise subtile du relief et de la couleur qu’il applique à l’estampe. Pour produire en série, il transpose ses gypsographies sur du métal et propose alors des gypsotypies dont les matrices sont en cuivre ou en cuivre aciéré. Il invente également une technique sur pierre lithographique sculptée pour satisfaire aux nombreux tirages de L’Estampe originale.
Le fonds d’atelier parvenu au Petit Palais comporte des dessins préparatoires, des matrices et des étapes de travail inédites d’aquarelles estampées, de gypsographies, de gypsotypies, et d’églomisations, mais aussi de médailles. Tous permettent de mieux comprendre le processus créatif éminemment original de Pierre Roche et témoignent de sa soif d’invention et d’expérimentation. Ces œuvres graphiques précieuses révèlent ainsi la virtuosité technique de l’artiste autant que sa singularité créative.
Pierre Roche n’hésite pas à prendre la plume pour décrire ses procédés créatifs et ses partis pris :
"Sur un léger bas-relief dont les creux sont calculés pour reproduire dans la contrepartie des aspérités propres à retenir l’encre on prend un moule en plâtre. C’est dans ce plâtre que le papier comprimé à la main doit chercher à la fois l’encre et le modelé."
Pierre Roche, "La Gypsographie et son avenir", Revue Encyclopédique, 15 aout 1896.
"Les gypsographies sont imitées ; j’ai vu Sagot qui en annonce ; il appelle ainsi tout ce qui est gravure avec sailli sur le papier. Il en fait remonter l’invention à Roche et n’a aucune idée de la particularité du procédé."Journal de Pierre Roche, 7 novembre 1894

Pierre Roche (1855-1922)
1920
Gypsographie
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1920
Gypsographie
Collection particulière
Gypsographie
Estampe en relief ou gaufrée élaborée à partir d’une matrice en plâtre. Pour créer un effet de matière sur l’arrière-plan de l’œuvre, l’artiste utilise un support plat en bois, en verre ou en ardoise. Il forme dessus son modèle en cire. Puis il coule sa matrice en plâtre en utilisant la technique de moulage à la cire perdue. La matrice en plâtre apparaît alors en creux. Pour l’impression, il passe une couche de gomme laque pour atténuer la porosité du plâtre et pose ses encres de couleur au pinceau. Il humidifie un papier japon qu’il va mouler à la main sur la matrice. Chaque tirage est unique. La fragilité de la matrice en plâtre limite le graveur à une trentaine de tirages.

Pierre Roche
Matrice en cire sur panneau de bois pour une gypsographie
H. 16 x L. 23,5 cm
Collection particulière

Pierre Roche
Matrice en cire sur panneau de bois pour une gypsographie
H. 16 x L. 23,5 cm
Collection particulière
Gypsotypie
Estampe en relief ou gaufrée élaborée à partir d’une matrice en cuivre ou en cuivre aciéré. L’artiste modèle d’abord une maquette en cire : des marques de rifloirs, un outil à modeler, et des empreintes de doigts apparaissent largement sur plusieurs matrices et témoignent de leur modelage manuel. Puis, à partir de cette maquette, Pierre Roche crée un moule en creux et le couvre de plombagine le rendant ainsi conducteur électriquement pour la galvanoplatie. Celle-ci lui permet de reproduire fidèlement son modèle. Grâce au courant électrique, le cuivre se dépose sur le moule et forme alors une « coquille » en métal. La matrice est ainsi créée. Le motif apparaît en creux. Il encre sa matrice, humidifie sa feuille et passe l’ensemble sous une presse en taille douce. Le graveur peut effectuer jusqu’à 2500 tirages.
Cette gypsotypie sur le thème du sport témoigne des recherches de l’artiste sur l’anatomie et sur le mouvement. Les gypsographies de Roche ne peuvent fournir que de petits tirages car les matrices en plâtre sont fragiles et se cassent rapidement. Il invente donc la gypsotypie : ce procédé utilise une matrice en cuivre ou en cuivre aciéré plus robuste, et permet d’imprimer un plus grand nombre d’exemplaires.
Vidéo réalisée à partir des notes laissées par Pierre Roche
"1° Bas-relief léger en cire ou plastiline sur un fond verre, bois, ardoise etc, donnant des effets différents au tirage.
2° Moulage : creux en plâtre
3° Sur le creux en plâtre, une couche de gomme laque
4° Tirage
- Blairotter léger bistre partout
- Enlever au pinceau les blancs et les couleurs
- Poser les noirs
- Poser les couleurs
5° Encres fabriquées chez Lorilleux – grasses"
La Calomnie
Les multiples essais consacrés au motif de La Calomnie témoignent des différentes étapes propres à la fabrication d’une églomisation. Pierre Roche adapte au domaine des arts graphiques le procédé du verre églomisé, pratiqué dès l’Antiquité et dont il connaît des modèles créés à la Renaissance. L’artiste imagine un dessin qu’il transpose sur une matrice en acier. Il l’imprime sur une feuille transparente, par exemple du papier calque ou du parchemin. Cette feuille transparente est placée sur une feuille de fond en or ou en argent, colorée par l’artiste pour produire de délicates nuances. La superposition et l’agglomération des différentes couches produisent l’églomisation finale. La fragilité du procédé ne permet pas de nombreux tirages.
Églomisation
Ces deux objets représentant La Calomnie et la furie Erinye sont des églomisations parfaitement abouties avec l’utilisation de feuilles de mica, matériau transparent proche du verre. Ce procédé décrit dans les catalogues anciens de l’œuvre de l’artiste n’a jamais été montré ni identifié jusqu’alors. Roche pose sur le papier et les autres supports en deux dimensions un regard de sculpteur. Il donne à l’œuvre de la profondeur et du relief en superposant les feuilles et les encres.
Médailles
Le fonds du Petit Palais, tout à fait exceptionnel, comporte plusieurs modèles en cire et en plâtre, ainsi qu’un moule utilisé pour réaliser une médaille représentant un jeune garçon. Ces œuvres de travail, généralement détruites après la fonte des exemplaires définitifs en bronze, permettent de bien comprendre les différentes étapes du processus de création de l’artiste. Le modèle original, modelé en cire, est ensuite moulé : le moule en creux sert à la réalisation d’un modèle en plâtre, qui sert à son tour à la fonte de la médaille en bronze.
Tutoriel : réalisation d'une médaille en plâtre : https://www.petitpalais.paris.fr/sites/default/files/tuto_medaille_en_platre.pdf
"Dorénavant, qu’importe à l’artiste les manipulations plus ou moins compliquées, les liquides plus ou moins complexes ? L’intérêt n’est plus là, il est dans le parti que son imagination saura tirer de la neige. A lui de préparer les formes délicates sur lesquelles doit se déposer ce duvet blanc, à lui de modeler les surfaces larges et arrondies autour desquelles doit se draper ce manteau neigeux."
Pierre Roche, La neige et la sculpture.
Statues de neige
Pour la réception du Tsar Nicolas II à Paris en 1896, Pierre Roche invente deux statues de glace destinées à orner l’escalier d’honneur de l'hôtel de Ville. Les deux ours étaient coulés en cuivre ou en zinc, métaux qui résistent au froid et ne se déforment pas. Un récipient d’acide sulfurique placé à l’intérieur des statues leur permettait de se couvrir d’une fine couche de neige. Il ne reste de cette innovation que ce petit modèle en bronze.

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Bronze et socle en béton
H. 11 x L. 4,3 x P. 4,3 cm
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1896
Bronze et socle en béton
H. 11 x L. 4,3 x P. 4,3 cm
Collection particulière
L’anatomie des formes vivantes et la radiographie
Pierre Roche s’enthousiasme pour une découverte encore récente, la radiographie. Afin d’encourager les artistes à s’emparer de cette technique, il écrit des articles à ce sujet, comme dans la revue L’Art décoratif en 1908 : "La radiographie, comme un œil d’une puissance surhumaine, pénètre l’homme tout entier et tout vivant. Les rayons traversant à la fois, mais avec une résistance qui les différentie, les muscles et les os, l’image qu’ils donnent projetée sur un écran ou sur une plaque photographique, est bien autrement instructive que celle d’un organisme mort et décomposé."

Affinités électives
Pierre Roche s’épanouit dans un cénacle intellectuel et artistique dont on ressent l’influence sur son œuvre. Parmi ses maîtres figure le sculpteur Aimé-Jules Dalou qui l’a encouragé à se consacrer à une carrière artistique. Il reçoit également les conseils du peintre Alfred Roll et note dans son journal, le 18 mars 1890, que "Roll est toujours fort aimable, c’est un homme tout d’une pièce, assez sûr de lui-même je suppose avec une sorte de timidité singulière et qu’on retrouve souvent chez les artistes. La façon dont il me traite est si amicale avec une réserve assez difficile à caractériser que je ne sais s’il est sûr de son fait." Le 24 avril 1890, il rencontre pour la première fois Rodin : "Je suis passé au Champs de Mars j’y ai été présenté à Rodin, fort aimable, onctueux dirai-je ne se livrant certes pas mais élogieux". Son cercle amical comprend également des écrivains, des artistes, des amateurs et des critiques, tels Siegfried Bing, Jean-Paul Laurens, Paul Vitry, Roger Marx, Louis Vauxcelles, Charles-Marie Dulac ou encore Joris-Karl Huysmans. Ses gypsographies ou églomisations étant souvent destinées à ce petit cercle de connaisseurs, la production de Roche conserve encore aujourd’hui un caractère confidentiel.
Huysmans
Pierre Roche rencontre en 1892 l’écrivain et critique d’art Joris-Karl Huysmans, avec lequel il partage des affinités symbolistes. Il illustre à sa demande le frontispice de son roman La Cathédrale (1897), qu’il traduira en vitrail pour sa propre chapelle familiale située à Pordic. Pierre Roche sculpte également en 1900 le buste de son ami : la belle expressivité du visage de Huysmans témoigne de son talent de portraitiste. Ce beau portrait a été conservé par l’écrivain sa vie durant avant d’être rendu à l’artiste à la mort de Huysmans en 1907.

1898
Verre, plomb
H. 84 x L. 61 x P. 2 cm
Collection particulière

1898
Verre, plomb
H. 84 x L. 61 x P. 2 cm
Collection particulière

Huysmans/ Pierre Roche
1898
Parchemin églomisé
H. 19 x L. 15 cm
Collection particulière

Huysmans/ Pierre Roche
1898
Parchemin églomisé
H. 19 x L. 15 cm
Collection particulière
Dalou
Cette gypsographie est un hommage de Roche à son maître Jules Dalou. L’artiste propose également une version du buste en bronze et même un monument qui ne sera jamais achevé. Réalisé en 1902 à partir d’un masque mortuaire, le visage émacié et nerveux de l’artiste se distingue par une puissance expressive, louée par la critique. Le buste sera acheté par la Ville de Paris en 1912.
"Dalou me donne des conseils pratiques ; les mesures de l’oreille au front au nez au menton les deux arcades zygomatiques toutes marquées par une fiche en bois dans la terre. Il est impossible d’être plus naturellement obligeant et encourageant."
Journal de Pierre Roche, 22 septembre 1891
Saint Jean-Baptiste
Pierre Roche aime varier les matériaux pour ses sculptures et mélanger différents types de métaux et de pierres. Il se sert de l’iconographie de saint Jean-Baptiste comme d’un prétexte pour jouer des contrastes. Les traits juvéniles du visage du saint sont sculptés dans un marbre blanc, tandis que le socle est en marbre noir orné d’une médaille en bronze : le contraste offre une vision prémonitoire de la tête décapitée du personnage biblique. Le buste sera exposé à la Société nationale des Beaux-Arts en 1902.

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Buste en marbre blanc, socle en marbre noir, bas-relief en bronze
Musée des Arts décoratifs, inv. PR 2005.192.1

Pierre Roche (1855-1922)
1901
Buste en marbre blanc, socle en marbre noir, bas-relief en bronze
Musée des Arts décoratifs, inv. PR 2005.192.1
À partir de janvier 1889, Pierre Roche fréquente régulièrement Charles-Marie Dulac (1866-1898) dont il reçoit les conseils et exécute le buste. Il voyage avec lui en juin 1890 :
"Séjour à Vézelay charmant, conversé avec Dulac ; curieuse impression de ce produit parisien au milieu de la grande et imposante nature. Charmant, généreux et artiste jusqu’aux bouts des doigts, à peine entamé par Montmartre. Par quel étrange mystère est-il amoureux de cette cathédrale de la Madeleine."
En novembre 1892, Pierre Roche admire
"les lithographies de Dulac très intéressantes, d’un beau dessin et d’un coloris d’une finesse exquise"
et dès 1894, il illustre l’ouvrage Cantique des créations de son ami de plusieurs cartouches.
Citations tirées du Journal de Pierre Roche

Pierre Roche (1855-1922) et Charles-Marie Dulac (1866-1898)
1897
Lithographie
Détail du cartouche pour l'illustration du Cantique des créatures de Charles-Marie Dulac
Institut National d'Histoire de l'Art

Pierre Roche (1855-1922) et Charles-Marie Dulac (1866-1898)
1897
Lithographie
Détail du cartouche pour l'illustration du Cantique des créatures de Charles-Marie Dulac
Institut National d'Histoire de l'Art

Dialogue par l’art – Pierre Roche et son fils, Louis Massignon
Pierre Roche est le père de Louis Massignon (1883-1962), islamologue de renom, professeur au Collège de France et à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, catholique mystique, précurseur de dialogue islamo-chrétien et intellectuel engagé. Il lui prodigue une éducation ouverte et complète alliant études, voyages, sports et arts. Mais le jeune Louis est tiraillé entre ce père agnostique, épris de science, et une mère très pieuse. En 1900, face aux doutes existentiels de l’adolescent, l’artiste lui présente, la même semaine, des amis francs-maçons et l’écrivain converti Joris-Karl Huysmans. Cette dernière rencontre sera décisive et orientera, plus tard, la spiritualité massignonienne autour des valeurs de compassion réparatrice, de souffrance rédemptrice et de substitution mystique.
Discret et attentif, Pierre Roche appuie de ses relations les débuts du jeune arabisant. Il le fait accompagner par un ami, le sculpteur Pierre Saintes, lors de sa première expédition au Maroc en 1904. Son ami, l’égyptologue Gaston Maspero, favorise la nomination du jeune diplômé d’arabe à l’Institut français d’archéologie orientale (IFAO) au Caire, en 1906. Grâce à un ami, le général Léon Beylié, il lui obtient une mission archéologique à Bagdad en 1908, puis supervise son rapatriement alors que le jeune homme, malade du paludisme et frappé par une crise mystique, vient d’échapper à une arrestation pour espionnage dans une Mésopotamie en proie aux troubles politiques.
Face à la brusque conversion de son fils dans ces circonstances dramatiques, le père incroyant cherche à le comprendre et entame avec lui un dialogue par l’art. Ses œuvres font écho aux préoccupations spirituelles de son fils et tissent des ponts par-delà leurs différences.
Gypsographie de Christine l’Admirable, 1902
Pierre Roche réalise cette gypsographie de la mystique flamande du XIIIe s. à la demande de Huysmans. Louis Massignon la gardera dans son bureau toute sa vie, y méditant sur le mystère de la mort et de la compassion réparatrice. Cette "colombe poignardée" est pour lui une figure de "compatiente", néologisme par lequel il nomme ces femmes visionnaires ou stigmatisées, souvent en marge de l’Église, et qui, par l’offrande de leur souffrance, œuvrent pour le salut de tous. Lors d’une conférence donnée pour les 700 ans de l’anniversaire de la mort de Christine l’Admirable, il confie à cette sainte son père mort incroyant.
"On y voyait, tout en haut, Christine, les mains jointes, orante, en extase, perchée comme un oiseau sur la plus haute poutre d’un gibet ; tandis que les suppliciés, pour qui elle intercédait, pesaient de leurs cadavres tordus, aux crocs du charnier, tout en bas ; sous un soleil brumeux" (EM I, p. 363).
"J’ai maintenant chez moi, sous les yeux, chaque jour, cette estampe, quand je prie ; la pensée de la mort présente, comme en tranchée. Elle me redit les confidences désespérées de plusieurs, rencontrées au seuil de l’agonie, amis jadis heureux qui se sont finalement suicidés, tandis que par une intervention inattendue, Dieu m’a refait chrétien. Jésus est là, vigilant à travers l’image de cette Sainte Christine nous criant que rien n’est impossible en amour, que la prière peut tout oser, qu’elle enlèvera nos âmes jusqu’à Dieu, à jamais, hors du cachot de nos péchés, des tombeaux de nos bonnes résolutions défuntes, de nos serments parjurés, de nos vœux trahis". (EM I, p. 364).
Louis Massignon, "L’apostolat de la souffrance et de la compassion réparatrice au XIIIe siècle", Écrits Mémorables, t. I (1924), Paris, Editions Robert Laffont, 2009, pp. 350-364
Médaille de Jeanne d’Arc (Jeanne d’Arc avait pour prier la croix de son épée), 1918
Pierre Roche voue une grande admiration à la "pucelle d’Orléans" à laquelle il dédie un projet de monument en 1890, deux zincographies représentant la chambre de Jeanne d’Arc en 1889 et cette médaille en 1918. En 1905, Louis Massignon est signataire d’une pétition contre Amédée Thalamas qui avait traité la sainte de fille à soldat, ce qui lui vaut d’être recalé à l’agrégation d’histoire et le pousse à partir au Caire, en 1906, début de sa carrière d’arabisant. Le père incroyant et le fils converti scelleront leur réconciliation en se rendant ensemble en pèlerinage à Domrémy, le 18 avril 1909. Louis Massignon s’y rendra par la suite sept fois.
Gypsographie de St François recevant les stigmates, 1912
Représenté par Pierre Roche dans cette gypsographie, le stigmatisé de l’Alverne marque profondément la spiritualité de Louis Massignon. C’est auprès de Huysmans, en 1900, qu’il découvre le privilège de la stigmatisation comme voie de sainteté, à la suite du Christ crucifié. En 1932, il devient tertiaire franciscain. La rencontre entre saint François d’Assise et le sultan al-Kâmil, à Damiette, en 1219, vécue comme un signe précurseur du dialogue entre chrétiens et musulmans, guide la fondation, en 1934, de la Badaliya ("substitution" en arabe), une union de prières pour le salut des musulmans et non leur conversion.
Médaille Jesus Caritas, 1920
Pierre Roche sculpte ce cœur surmonté d’une croix, accompagnés de la devise "Dieu est Amour", emblème de Charles de Foucauld. Cet officier, devenu explorateur au Maroc, se convertit au catholicisme au contact de la foi des musulmans. Devenu prêtre, il finit par se fixer à Tamanrasset où il mène une vie de prière et d’étude auprès des Touaregs. Louis Massignon le contacte d’abord en tant que jeune scientifique, par l’entremise du Général Lyautey et d’un ami de son père, Henry de Castries. Après sa conversion, il rencontre l’ermite du Hoggar en 1909, puis en 1913, et songe même à le rejoindre. S’ensuit une intense correspondance. A la mort de Foucauld en 1916, il devient son exécuteur testamentaire. Il n’aura de cesse de défendre la mémoire de "son frère aîné parti au désert" et de perpétuer son œuvre spirituelle, en contribuant notamment au procès de canonisation qui devrait aboutir en 2022. En 1953, cette médaille servira de matrice à celle de Badaliya, une union de prières créée par Louis Massignon. Le cœur de Jésus y est transpercé par la lance du Golgotha. On peut y lire écrit en arabe : "Jésus fils de Marie, c’est lui l’Amour".
Cette grande gypsographie de Pierre Roche présente le moment de la Résurrection, où Jésus aurait dit à Marie-Madeleine "Noli me tangere" (ne me touche pas). Pierre Roche insuffle du mouvement à sa composition afin d’évoquer le passage du monde terrestre au monde spirituel.

Pierre Roche (1855-1922)
1910
Gypsographie
Collection particulière

Pierre Roche (1855-1922)
1910
Gypsographie
Collection particulière

La mort et la guerre
Dans la lignée du symbolisme, Pierre Roche affectionne les allégories macabres, comme l’Ankou ou le Faucheur. Avec la Première Guerre mondiale, la mort envahit le quotidien de l’artiste. Son fils Louis Massignon (1883-1962) est mobilisé. Pierre Roche, trop âgé pour rejoindre le front, réalise alors une série de "médailles de guerre" qui évoque, sur un mode allégorique et poétique, les quatre années du conflit et leur cortège d’événements tragiques ou héroïques. Paul Vitry, conservateur des musées nationaux et ami de Pierre Roche, écrit dans l’avant-propos du Catalogue de Guerre des médailles, médaillons, plaquettes, jetons et gypsographies de Pierre Roche en 1918 : "Fixer dans le cadre restreint d’une médaille ou d’un jeton, à l’aide du langage convenu de la symbolique classique, le souvenir des grands faits de l’histoire d’un règne, éclairer au moyen du texte laborieusement condensé d’une inscription latine, le sens et la valeur des événements, telle était la tâche à laquelle s’attelaient officiellement, sous l’ancien régime, l’Académie des Inscriptions inspiratrice, puis les dessinateurs et graveurs, exécutants des médailles. Le roi distribuait ces médailles aux personnages qu’il prétendait honorer, les curieux en formaient des collections, des livres somptueux […] Un artiste, sous le coup direct de l’émotion des jours que nous traversons, à mesure que se déroule la chaîne des grands faits historiques que nous vivons, dans une pensée pieuse d’exaltation patriotique et d’hommage, s’est imposé à lui-même le programme d’antan."
Médailles
De 1914 à 1918, Pierre Roche réalise environ 80 médailles qu’il rassemble après la guerre sous le titre Une Histoire métallique de la guerre. Classées par année, ces médailles évoquent, comme un journal de bord, les grands événements de la Première Guerre mondiale : la mobilisation de l’été 1914, la vie dans les tranchées, la bataille de Verdun mais aussi l’espoir revenu, en 1918, avec le retour de l’Alsace à la France.
Pierre Roche et la guerre
L’Histoire métallique de la guerre est sans conteste le chef-d’œuvre de Pierre Roche dans l’art de la médaille. L’artiste sait choisir des allégories puissantes et expressives, à la fois héritières du symbolisme et parfaitement adaptées à la tragédie de la guerre moderne. Ainsi dans le Sous-marin allemand, un immense bras aux doigts crochus surgit du fond de l’océan pour engloutir une frêle embarcation.
La Mort
Ce buste en terre cuite polychrome appartient sans doute à un projet de décor inachevé. Le visage hiératique de La Mort est rehaussé de touches verdâtres sur les paupières et les lèvres, évoquant le bleuissement d’une noyée et accentuant l’étrangeté de l’œuvre. Cette iconographie unique dans son œuvre montre une nouvelle fois l’influence du courant symboliste dont la mort est une thématique centrale.

Pierre Roche (1855-1922)
1895
Terre cuite émaillée
H. 17 x L. 15,4 x P. 8 cm
Musée des Arts décoratifs, inv.27961

Pierre Roche (1855-1922)
1895
Terre cuite émaillée
H. 17 x L. 15,4 x P. 8 cm
Musée des Arts décoratifs, inv.27961
Le fonds d’archives du Petit Palais
Le fonds d’atelier de Pierre Roche comporte un ensemble d’archives, de livres et de documents très complet sur la vie et l’œuvre du sculpteur. L’intégralité en est conservée au Centre de ressources documentaires du Petit Palais, devenu depuis 2015 un lieu de référence pour l’étude de l’artiste.
Ce fonds a été inventorié et reconditionné en dix boites de conservation et deux classeurs de photographies. Son contenu, très riche, permet de documenter le processus créatif des œuvres de l’artiste et l’ensemble des procédés originaux de création de Pierre Roche. S’y trouve une série complète de documents préparatoires et de sources iconographiques, regroupée en dossiers thématiques et chronologiques.
De nombreux articles et revues, des photographies d’œuvres ainsi que le catalogue de l’artiste recensant toutes ses créations dispersées à travers la France et à l’étranger, permettent de reconstituer l’essentiel de sa carrière.
Les archives comprennent des lettres et des documents techniques, des brouillons, des cartes de visites, des invitations, des brevets, qui apportent des renseignements inédits sur la genèse de certaines œuvres et notamment sur la création de l’Histoire métallique de la guerre. Elles témoignent également de la participation du sculpteur à de nombreux salons et expositions entre 1900 et 1910, comme les salons de la Société Nationale des Beaux-Arts, les Salons d’Automne, ou les expositions du musée Galliera.
Une partie du fonds concerne les dons faits par la famille à différents musées après la mort du sculpteur en 1922.
Une section spécifique contient quant à elle des documents sur les travaux personnels du fils de Pierre Roche, Louis Massignon, et aborde des sujets religieux ou relatifs au monde musulman.
Ce fonds très riche est à la disposition des chercheurs. Il est consultable sur rendez-vous au Centre de ressources documentaires du Petit Palais
Nous vous renvoyons également vers le site consacré au fils de Pierre Roche, Louis Massignon : https://louismassignon.fr/ressources/archives/musee-du-petit-palais-2/
Programmation autour de l'exposition
ACTIVITÉS
Adultes et adolescents à partir de 14 ans
Atelier estampe : gaufrage en couleur
En salle, avec une plasticienne spécialisée en estampe, les participants découvrent les estampes en relief de Pierre Roche autour de la nature. En atelier, ils réalisent une composition en relief sur le thème végétal, qui sera ensuite imprimée en gaufrage sur papier sous la presse à gravure puis colorée.
Durée 4h. 20€
10 participants maximum. Matériel fourni. Apporter un tablier.
Mardi à 13h30
5, 19 avril ; 17, 31 mai ; 14, 28 juin
Billetterie en ligne ici ou sur petitpalais.paris.fr
Atelier modelage : empreinte en plâtre
En salle, avec un plasticien sculpteur, les participants découvrent les œuvres sculptées de Pierre Roche inspirées de la nature. En atelier, à partir d’éléments végétaux, ils réalisent un relief modelé en cire qui sera ensuite moulé en plâtre pour obtenir une empreinte.
Durée 4h. 20€
10 participants maximum. Matériel fourni. Apporter un tablier.
Vendredi à 13h30
11, 25 mars ; 8 avril ; 20 mai ; 3, 17 juin ; 8 juillet
Billetterie en ligne ici ou sur petitpalais.paris.fr
Atelier modelage et estampe : la gypsographie, estampe sur plâtre
Cet atelier propose de découvrir la technique originale de la gypsographie qui permet de créer une estampe en relief colorée sur papier à partir d’une matrice en plâtre.
La première journée, accompagnés d’un plasticien sculpteur, les participants découvrent en salle les œuvres de Pierre Roche. En atelier, ils réalisent une empreinte en plâtre, moule pour la création de gypsographies.
La seconde journée, avec une plasticienne spécialisée en estampe, après l’observation en salle des œuvres de Pierre Roche, ils réalisent en atelier, à partir de leur moule en plâtre, des gypsographies, impressions sur papier en relief et en couleurs.
Sur deux journées
Durée 2 fois 6h - 60€
10 participants maximum. Matériel fourni. Apporter un tablier.
Vendredi de 10h30 à 12h30 et de 13h30 à 17h30
Déjeuner libre entre 12h30 et 13h30.
22 et 29 avril ; 24 juin et 1er juillet ; 26 août et 2 septembre
Billetterie en ligne ici ou sur petitpalais.paris.fr
AUDITORIUM
Conférence
"Pierre Roche, un esprit Art nouveau"
Claire Pélissier, historienne de l’art
Principalement connu comme sculpteur, Pierre Roche fut avant tout l’un des artistes les plus actifs dans le renouveau des arts décoratifs français à la fin du XIXe siècle. Artiste
protéiforme plaçant le modelage à l’origine de toutes ses créations, il s’attacha tout au long de sa prolifique carrière à abolir les barrières académiques établies entre arts majeurs et mineurs.
vendredi 15 avril à 15h
Remerciements
Le Petit Palais remercie tout particulièrement Nicole et Bérengère Massignon pour leur grande générosité.
Claire Pélissier, spécialiste de Pierre Roche, a produit le premier travail universitaire sur l’œuvre de l’artiste (Mémoire de DEA Le sculpteur Pierre Roche (1855-1922). Un artiste inventeur oublié, Paris IV-Sorbonne, 2005) et nous a ce faisant ouvert la voie.
Pour leur regard précieux et leur travail sur le fonds Pierre Roche du Petit Palais, nous adressons nos remerciements les plus chaleureux aux restaurateurs du patrimoine : Laura Caru, Delphine Elie-Lefebvre, Sarah Gonnet, Bruno Le Namouric, Sophie Lennuyeux-Comnène, Alexandre Pandazopoulos, Karine Stragier.
Pour leur concours exceptionnel, nous adressons notre reconnaissance à Maria Chiba et Serge Bromberg de la Collection Lobster Films.
Nous remercions nos collègues des autres institutions qui ont apporté leur concours à ce projet et ont permis de faire avancer nos réflexions sur l’artiste. Valérie Sueur-Hermel, conservateur responsable de l'estampe du XIXe siècle à la Bibliothèque nationale de France et Nathalie Muller, responsable de la collection d'estampes modernes de la Bibliothèque de l'Institut national d'histoire de l'art.
Au musée d’Orsay, Edouard Papet, conservateur général, François Blanchetière, conservateur, Isolde Pludermacher, conservatrice en chef chargée des prêts, Odile Michel, cheffe du service de la régie des œuvres, Béatrice Remoissenet, régisseuse des œuvres, Stéphane Bayard, chargé du suivi des prêts, Denise Faïfe, documentation Peinture.
Au musée des Arts décoratifs, Audrey Gay-Mazuel, conservatrice, Chloé Demey, chef du service éditorial, Éve Briend, Pôle éditions et images, et Luna Violante régisseur. À l’ARCP, Aurélia Caillot, régisseure et Agnès Gall-Ortlik, chef de l’Atelier de restauration et conservation des photographies de la Ville de Paris.
Nous remercions également très chaleureusement les stagiaires qui nous accompagnés tout au long de ce projet : Victoria Chiado-Orblin, Justine Harambillet, Pierre Husson, Clotilde de Petiville et tout spécialement Tristan Fourmy.
Pour leur aide, nous remercions Patrick Lecouffe, Gérard Jouhet, Manuella Moscatiello, Fabiana Oliveira, Lou Ragasol-Barbey, Julien Raineau.
Cette exposition virtuelle est le pendant d’une animation des collections, présentée dans le parcours permanent du Petit Palais du 10 mars au 11 septembre 2022, et valorisant près de 130 œuvres de Pierre Roche. Pour leur implication dans cet accrochage, que soient remerciées les personnes suivantes :
COMMISSARIAT GÉNÉRAL
Christophe Leribault, conservateur général,
président de l’Établissement public du musée d’Orsay et du musée de de l’Orangerie
Juliette Singer, conservatrice en chef,
directrice par intérim du Petit Palais (octobre 2021 - février 2022)
COMMISSARIAT SCIENTIFIQUE
Cécilie Champy-Vinas, conservatrice du patrimoine, directrice du musée Zadkine
Joëlle Raineau-Léhuédé, collaboratrice scientifique arts graphiques, Petit Palais
Clara Roca, conservatrice du patrimoine, chargée des arts graphiques,
livres et photographies après 1800, Petit Palais
SCÉNOGRAPHIE, GRAPHISME ET ÉCLAIRAGE
StudioTovar : Alain Batifoulier et Simon de Tovar
RÉALISATION SCÉNOGRAPHIQUE
Aménagements : Ateliers des musées de la Ville de Paris
Soclage : Le Socle
Signalétique : L’Atelier
Secrétariat d’édition : Nordcompo
Traductions anglaises : Emma Lingwood
LOGISTIQUE
Transport des oeuvres : Bovis et Direction des collections de Paris musées
Accrochage : Bovis et équipe du Petit Palais
CONSERVATION-RESTAURATION
Laura Caru, Delphine Elie-Lefebvre, Sarah Gonnet, Bruno Le Namouric,
Sophie Lennuyeux-Comnène, Alexandre Pandazopoulos, Karine Stragier
PARIS MUSÉES
Anne-Sophie de Gasquet, directrice générale
PETIT PALAIS, MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE LA VILLE DE PARIS
Annick Lemoine, directrice
Delphine Capdepuy, secrétaire générale
Vincent Roy, secrétaire général adjoint, sécurité et bâtiment
Frédéric Coquet, secrétaire général adjoint, ressources humaines
Alice Le Gall, cheffe du service surveillance, sécurité et accueil
Didier Pothin, responsable maintenance bâtiment et logistique
Marius Adin, peintre
Stéphane Minasoglu, menuisier
Cécile Maisonneuve, cheffe du service des expositions et de la régie
Charlotte Piot, adjointe à la cheffe de service, responsable de la conservation préventive
Jean-Charles Dupuy et Patrick Pinel, adjoints techniques et installateurs
Roxanne Sassot, monteuse-encadreuse
Mathilde Beaujard, cheffe du service communication et presse
Monique Bouscasse, chargée de communication
Mathilde Techer, assistante communication
Fabienne Cousin, cheffe du service éducatif et culturel
Catherine André, chargée de projets médiation et accessibilité
Françoise Chatillon, responsable de programmation auditorium et événements
Cécile Betoux, intervenante plasticienne gravure
Isabelle Duchange, intervenante conférencière
Alexandra Garnier, intervenante plasticienne
Damien Granelle, intervenant plasticien sculpture
Sylvie Colomb, cheffe du service des ressources documentaires
Marguerite de Massé, cheffe du service de la valorisation
Jonas Dubreuil-Tuffery, chargé de la valorisation
Et toute l’équipe du Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
DIRECTION DES EXPOSITIONS ET DES PUBLICATIONS
Julie Bertrand, directrice
Fanny Hollman, directrice adjointe et cheffe du service des expositions
Béatrice Abonyi, responsable de la muséographie et de la scénographie
Charlotte Giraud, chargée du suivi budgétaire et administratif
DIRECTION DES COLLECTIONS ET DE LA RECHERCHE
Charles Villeneuve de Janti, directeur
Maximilien Durand, directeur adjoint des collections
Emmanuelle Bas, régisseuse des oeuvres, responsable des réserves mutualisées
Christian Hubert, chargé du suivi de la conservation préventive, de la restauration et des acquisitions
Nathalie Vialaron, adjointe à la responsable des réserves mutualisées
Frantz Marignale, agent de maîtrise
Stéphane Chantalat, chef du service Informatisation et Numérisation des Collections
DIRECTION DU DÉVELOPPEMENT DES PUBLICS, DES PARTENARIATS ET DE LA COMMUNICATION
Josy Carrel-Torlet, directrice
Nina Garnier, cheffe du service communication
Blandine Cottet, adjointe à la cheffe du service communication, responsable partenariats et publicité
Florian Brottes, chargé de communication
Andréa Longrais, chargée des relations presse et des relations publiques
Hélène Boubée, chargée de l’éditorialisation numérique
Scarlett Greco, cheffe du service numérique
Marine Baudry, responsable projet et médiation numériques
Kristel Fauconnet, responsable projet et médiation numériques
Frédérique Leseur, cheffe du service développement des publics
Audrey Della Faille, chargée de l’offre culturelle et événementielle
DIRECTION ADMINISTRATION ET FINANCES
Alice Lebredonchel, directrice
Agathe Duhamel, cheffe du service financier
et adjointe à la directrice administrative et financière
Eva Cecotti, responsable du pôle juridique
Jérôme Berrier, chef du service achats et logistique
Clémence Raunet, acheteuse publique et adjointe au chef du service achats et logistique
Et l’ensemble des collaborateurs de Paris Musées